samedi 17 octobre 2015


Le sens du son
Klaus Blasquiz
T’es grave dans les basses !

Qui n’a jamais entendu l’ânerie : « mets-moi un peu de présence dans le médium, l’aigu est un peu agressif», ou encore : « le son est un peu froid, tu peux arrondir les basses ? ». Connaissons-nous nos fréquences et de quoi est constitué le bruit, parfois musical, que nous manipulons ?

Se réfugier dans la paresse, ou derrière l’excuse que l’on n’est pas équipé, ou que l’on n’a pas besoin de savoir (ça risque de tuer ma spontanéité !), n’est plus acceptable aujourd’hui, surtout si l’on se targue d’être un pro de la musique (et du son). Il est surprenant de voir que certains musiciens, connaissant bien « la musique », méconnaissent le monde de l’acoustique et ignorent parfois  totalement de quoi sont faits les sons dont ils jouent. Gardons notre venin pour les plus sourds et ajoutons notre pierre à l’édifice de l’éducation de notre oreille en essayant d’être plus didactique que sarcastique (tic tic).

Des bandes
D’abord, il faut rappeler que les registres fréquentiels que l’on englobe habituellement dans les dénominations : grave, médium grave, médium, médium aigu et aigu, correspondent à des bandes de fréquences délimitées. Pour certains, l’extrême-grave commence au seuil de l’audibilité, à 20 Hz (sous-grave ou infra-basses), que l’on ressent plus que l’on entend (de 0 à 30 Hz), et « monte » à  55 Hz, laquelle fréquence, faîtes-en l’expérience, est encore extrêmement grave. Vient ensuite le registre des basses, de 55 à 110 Hz, puis le bas-médium, de 110 Hz à 220 Hz (là aussi de 2 octaves), le médium, de 220 à 880 Hz, le haut-médium, de 880 à 1,76 KHz et enfin l’aigu lui-même, à partir de 1,76 KHz. Ce dernier registre est limité dans le haut par un seuil d’audibilité variable, fonction de l’âge de l’oreille et de sa bonne santé. On se limitera donc à 20 KHz, même si à partir de 25 ans, et après de longues heures de répétitions électro-acoustiques, on n’aura plus accès à ce qui se passe au-dessus de 15 KHz, voire moins. Mais, d’une part 15 KHz, c’est encore très aigu, et d’autre part, ces hautes fréquences sont rarement centrales dans les sons musicaux. D’autres annoncent que le grave commence à 100 Hz, le bas-médium à 400 Hz, le médium à 1 K, le haut-médium à 3 K, les aigus à 6 K et considèrent que tout ce qui s’envole au-dessus de 10 K n’est que des stridences. D’autres enfin considèrent que de 20 à 60 Hz on est dans l’extrême-bas, de 60 à 120 dans le grave, de 120 à 400 dans le bas-médium, de 400 à 4 K on se trouve dans le médium, de 4 à 7 K dans le haut-médium, au-dessus on est dans l’aigu et qu’à partir de 12 K on est rendu dans l’extrême-aigu. Entendez-vous ? Tout cela pour dire que si l’on ne connaît pas « ses fréquences », on ne saura pas ou se situe l’insistant larsen ou la vilaine bosse dans le son de piano que restitue péniblement un retour fatigué (comme le sonorisateur de scène).
On peut s’exercer, se rafraîchir les esgourdes (les cages à miel ?), ou tout bonnement se tenir au jus sonore en travaillant avec par exemple un petit logiciel gratuit, Audacity, qui permet de générer des fréquences simples ou des bandes de fréquences comme du bruit rose ou blanc. Ah tiens mais qu’est-ce ?

Bruits en couleurs
Le bruit blanc est un son contenant toutes les fréquences du registre audible (généralement entre 250 et 8 K) en quantité égale. Pour des questions de perception (psycho-acoustique) le cerveau croit que les aigus sont relevés. Le bruit rose quant à lui est un bruit blanc ayant été filtré de manière à réduire l’intensité à chaque octave (de l’ordre de 6 dB) de manière à compenser le fait que plus on monte et plus le nombre de fréquences augmente par octave. Il existe également un certain son marron (qui n’a rien à voir avec des fréquences provoquant des troubles intestinaux) qui tente de simuler le mouvement brownien, qui saute en incréments réguliers, tout en déclinant de 6 dB par octave. Son inverse étant appelé le son violet, dans lequel les fréquences sont montées de 6 dB à chaque octave. Question d’harmonie… de couleurs.